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--ALSACE CULTURE BILINGUE-- René Schickele Gesellschaft
22 octobre 2019

Oskar Woehrle, écrivain et poète alsacien de langue allemande

woehrle

Parlons un peu d’Oskar Woehrle, autre figure emblématique, injustement méconnue, de la littérature et de l’âme alsacienne, et remercions Philippe Edel et Marc Chaudeur de nous en donner l’occasion avec cet essai, documenté, paru il y a quelques temps déjà dans la revue LES CAHIERS LITUANIENS n°16, intitulé : « L’écrivain et poète Oskar Woehrle (1890-1946), un rebelle saisi par la Lituanie ». 

Ci-après, un lien donne accès aux CAHIERS et au téléchargement intégral de l’essai : http://www.cahiers-lituaniens.org/CHAUDEUR-EDEL-MURINGER-Oskar-Wohrle-un-rebelle-saisi-par-la-Lituanie-n-16-2017.pdf

Woehrle est un enfant du peuple né à Saint-Louis (Sankt-Ludwig) en 1890. Né allemand, il passe l’essentiel de sa brève vie dans l’espace culturel allemand. Pendant le première guerre mondiale, il partage le destin des Alsaciens incorporés dans la Wehrmacht, engagés sur le front germano-russe, même si son expérience de journaliste le désigne très vite comme rédacteur du Journal de la 10èmearmée, dont le siège est à Vilnius (Zeitung der 10. Armee).  

Il est l’auteur d’un roman, remarqué, paru avant la guerre, Der Baldamus und seine Streiche (dont une traduction est disponible à la Nuée bleue sous le titre : Baldamus ou le diable aux trousses). Ses années de guerre en Lituanie lui inspirent deux ouvrages, majeurs, Soldatenblut et Das Bumserbuch, « deux recueils d’histoires et de poèmes dans un argot corrosif et inventif que lui inspire la vie militaire », selon MM. Edel et Chaudeur. « Oskar Wöhrle est une figure passionnante de la littérature de la première moitié du XXe siècle, précisent-ils en introduction. Il incarne un type d’écrivain assez peu représenté en Alsace, celui du rebelle aux semelles de feu, du Quergänger à l’esprit libre et imprévisible. Il renoue d’une certaine manière avec une tradition picaresque. Son œuvre n’a d’égale, pour ce qui concerne sa truculence, que celle de certains auteurs des XVIe et XVIIe siècles, Grimmelshausen notamment. Wöhrle est une sorte de soldat existentialiste, dont la conception et l’opinion résultent toujours de son expérience vécue. » Quergänger désigne une personne qui renonce aux sentiers battus et n’hésite pas à s’engager dans des chemins de traverse au bout desquels il n’est pas rare qu’elle trouve des pépites…

En 1932, paraît, à Berlin, son grand roman historique Jan Hus, consacré à la vie du réformateur tchèque brûlé à Constance, en 1415. Mais les événements historiques le rattrapent, son Bumsenbuch subit l’autodafé de 1933 et il se réfugie, pendant la guerre, en Suisse où il vit d’expédients. Il n’en trouve pas moins le temps de publier, à Strasbourg, ses Schilighemmer Ernte, recueil de « poèmes, d’une veine populaire où l’on devine l’influence de Heine, de Lenau et de Villon », dont il se sentit toujours très proche. 

Woehrle gardera de ses années lituanienne une passion pour la culture de ce pays, dont il apprend la langue, et le Quergängerjouera le rôle de passeur, faisant connaître des auteurs tels Petras Klimas, et s’impliquant dans le processus d’indépendance de la Lituanie. 

Last but not least, citons, de Woerhle, ce poème en prose : 

 

Il n’y a pas que les vivants, les morts aussi portent un uniforme  (Nicht nur die Lebendigen, auch die Toten haben ihre Uniform) 

Il n’y a pas que les vivants, les morts aussi portent un uniforme. Il est vrai que celui des morts est étrange. Il n’est taillé dans nul tissu, de nulle couleur, seulement fait de silence sans frontières. Nul bouton n’y brille, nul galon, nulles épaulettes et écharpes rutilantes, qui signalent les différences. Là, tout est pareil. Le sergent est couché à côté du lieutenant, le lieutenant à côté du capitaine, le capitaine à côté du colonel, le colonel à côté du simple soldat. Il n’y a plus de différences de race. L’uniforme de la mort les a tous habillés en citoyens du même royaume, le Français et l’Allemand, le Russe et l’Autrichien, le Bulgare et le Serbe, l’An- glais et tous les autres qui ne sont pas oubliés. 

Les voilà gisant en pleine stupéfaction : tous avec la même expression d’incompréhension, d’interrogation sur le visage. Je les vois alignés, depuis le début de l’Histoire, le Carthaginois à côté du Romain, le Tatar à côté de l’Occidental, l’Aztèque à côté de l’Espagnol, posant la même question du fond de la mort, à travers les siècles. Et la vie insensée ne sait rien leur donner d’autre en guise de réponse que d’entasser davantage de tués. Tous enveloppés dans le même manteau maternel. Le manteau du silence. (texte issu du Bumserbuch, 1916, traduit de l’allemand par Daniel Muringer). 

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